
Extension de l’application immédiate de la loi pénale plus douce en matière de contrefaçon de pièces automobiles
Une décision récente illustre l’importance de l’évolution législative en matière de contrefaçon liée aux pièces détachées automobiles, en lien avec la loi du 22 août 2021 relative à la lutte contre le dérèglement climatique.
Dans cette affaire, une société française, filiale d’un groupe espagnol, revendait des rétroviseurs fabriqués par ce groupe, fournisseur de première monte pour de grands constructeurs français. À la suite d’une enquête, la société et son dirigeant ont été poursuivis pour divers délits de contrefaçon, notamment la détention, l’importation et la vente de produits contrefaisants, ainsi que l’importation sans déclaration en douane de marchandises prohibées.
Cependant, la cour d’appel a appliqué les nouvelles dispositions de l’article L. 513-6 du Code de la propriété intellectuelle, modifié par la loi n° 2021-1104. Cette réforme précise que les droits conférés par l’enregistrement d’un dessin ou modèle ne s’opposent plus à des actes visant à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur, dès lors qu’ils sont réalisés par l’équipementier d’origine.
Une loi pénale plus douce au bénéfice des prévenus
La cour retient que cette loi, bien qu’entrée en vigueur après les faits, constitue une loi pénale plus douce, car elle instaure un régime d’exonération de responsabilité pénale. Elle n’a ni modifié la peine ni redéfini les éléments constitutifs de l’infraction, mais offre une cause d’irresponsabilité nouvelle.
La portée élargie de l’exonération
L’intérêt majeur de cette décision réside dans l’interprétation étendue de cette exonération. Selon la cour, celle-ci ne concerne pas uniquement l’équipementier d’origine, mais s’applique également à l’ensemble de la chaîne commerciale jusqu’au consommateur final. Autrement dit, toute revente par des intermédiaires, dès lors que la pièce est fabriquée légalement par l’équipementier, ne saurait être poursuivie. Une interprétation plus restrictive viderait la loi de sa substance, puisque l’équipementier n’aurait aucun débouché légal.
Une atteinte proportionnée aux droits de propriété
La décision souligne que cette réforme opère une atteinte limitée et justifiée aux droits de propriété intellectuelle. Elle vise en effet un objectif légitime : favoriser l’entretien des véhicules par l’ouverture à la concurrence du marché des pièces visibles, dans un souci de durabilité. Le législateur a ainsi cherché à éviter la mise au rebut de véhicules réparables, en raison du coût excessif des pièces d’origine.
Enfin, la cour d’appel rappelle que cette interprétation ne méconnaît pas le principe d’interprétation stricte de la loi pénale, en ce qu’elle se borne à donner effet à une volonté législative claire.
Cette décision confirme que l'évolution du droit pénal économique peut, dans certains cas, desserrer l'étau des responsabilités pesant sur les acteurs industriels, en conciliant droit de propriété et intérêt général.